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Un conflit d’épaule discret : Démarche diagnostique

Dr Jérôme Renoux (Hôpital Pitié-Salpêtrière ; CEPIM - Clinique des Lilas ; INSEP)

Un handballeur professionnel de 27 ans consulte pour une douleur chronique à l’armer du bras, avec une majoration récente de ses symptômes. À l’examen clinique, les amplitudes articulaires passives sont conservées. Le patient présente de discrets signes d’instabilité antérieure. La manoeuvre de Jobe est positive.

Diagnostic

Dans un premier temps, une IRM est réalisée (Fig. 1). Elle met en évidence des lésions d’impaction osseuse du versant postérosupérieur du tubercule majeur et une tendinopathie de la face profonde du tendon supra-épineux. Le labrum est respecté.

Figure 1 – A : Coupe frontale IRM T2 FatSat. Impactions osseuses du tubercule majeur. B : Coupe sagittale IRM T2 FatSat centrée sur le tubercule majeur. Tendinopathie du versant profond du supra-épineux.

Ces signes font évoquer un conflit postérosupérieur (dit conflit de Walch).

 

Quelques signes de conflit sousacromial sont aussi présents (bursite sous-acromio-deltoïdienne et tendinopathie du versant superficiel du supra-épineux).

Il n’y a pas de signe en faveur des diagnostics différentiels dans les douleurs d’armer du bras :

  • pas d’atteinte acromio-claviculaire ;
  • pas d’atteinte des muscles infraépineux (myopathie de dénervation par atteinte du nerf suprascapulaire) ou du muscle serratus antérieur (nerf thoracique long).

Cette imagerie peine à convaincre, surtout en raison du caractère peu prononcé de l’atteinte tendineuse. Le patient est mis au repos et rééduqué pour son conflit sousacromial.

 

On note une amélioration : les douleurs persistent a minima, mais n’empêchent pas l’armer du bras. Elles réaugmentent progressivement au bout de 4 mois, rendant la pratique du sport quasiment impossible.

 

Un arthroscanner est réalisé en position neutre (rotation neutre, bras le long du corps en figure 2) et en position d’armer du bras (dite position ABER pour ABduction Rotation Externe) afin de visualiser le conflit (Fig. 3).

Figure 2 A : Arthroscanner en coupe axiale. Clivage de la face articulaire du supra-épineux et impaction du tubercule majeur. B : Arthroscanner en coupe axiale. Désinsertion du labrum antéro-inférieur et lésion cartilagineuse.

Figure 3 – Arthroscanner en position d’armer (ABER). Mise en contact du versant profond du supra-épineux et du labrum postérieur. Ouverture du clivage du supra-épineux montrant la perte de substance massive.

En position neutre, on peut faire la même observation qu’en IRM : l’impaction du versant postérosupérieur de la jonction entre tête et col huméraux (située plus haut qu’une encoche de Malgaigne) est visualisée.

L’atteinte du versant articulaire du tendon supra-épineux est plus évidente sous la forme de plusieurs clivages remplis par le produit de contraste.

 

On voit aussi une lésion du labrum postérosupérieur et du labrum antéroinférieur ainsi que du cartilage adjacent.

 

Seule la position d’armer (ABER) permet de comprendre la survenue du conflit : sur ces coupes axiales, on voit bien la proximité du tubercule majeur et du labrum postérosupérieur, et de la face articulaire du supra-épineux.

 

Par ailleurs, le fait de détendre ce tendon permet d’ouvrir le clivage, ce qui montre l’importance de la perte de substance tendineuse touchant plus des deux tiers de l’épaisseur du tendon.

Discussion

Comment intégrer les lésions antéroinférieures ?

Il s’agit de lésions de passage d’une instabilité antérieure. Cette laxité antérieure favoriserait le conflit postérosupérieur en augmentant la rotation externe de l’épaule (Jobe, 1992).

Le conflit de Walch

Le conflit postérosupérieur, décrit par Walch en 1991, est un conflit intra-articulaire qui survient lors de la pratique des sports de lancer. Il se manifeste lors de la répétition du mouvement d’armer du bras amenant la face profonde du supra-épineux (à la jonction avec le tendon infra-épineux) contre le rebord postérosupérieur de la glène.

Les facteurs favorisants

Plusieurs facteurs favorisants ont été proposés :

  • défaut de rétrotorsion de la tête humérale par rapport à la palette humérale ;
  • défaut d’adduction de la scapula lors du mouvement d’armer du bras ;
  • distension de la capsule antérieure.

Traitement

Le traitement est le plus souvent médical (repos, anti-inflammatoires et rééducation renforçant l’adduction de l’omoplate).

 

Le mouvement en cause peut être modifié si possible, ce qui reste difficile chez un sportif professionnel.

 

En cas d’échec, un traitement chirurgical est proposé (débridement ou réparation des lésions tendineuses), mais il est, en règle générale, décevant.

 

À retenir

Le conflit postérosupérieur peut avoir une présentation discrète en imagerie. S’il est évoqué cliniquement, des examens en position de conflit (ABER) permettent de mieux en faire le diagnostic positif et le bilan lésionnel.

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