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CAUSE INHABITUELLE DE TATALGIE : démarche diagnostique

Dr Jérôme Renoux (INSEP, Paris)

Pauline H., jeune femme de 21 ans, sans antécédent particulier, présente une tatalgie, sans notion traumatique. Nous présentons ici la démarche diagnostique ainsi que les différents examens d’imagerie réalisés.

Historique

L’apparition de la douleur a été rapidement progressive et existe depuis 5 jours à l’examen clinique. L’appui sur le talon, environ 2 cm en aval de l’insertion de l’aponévrose superficielle, est très douloureux et les déplacements de la patiente nécessitent l’usage d’une canne anglaise. A priori, aucun nodule n’est palpé mais la douleur interdit toute palpation profonde. Il n’y a pas de gonflement local. La patiente pratiquait la course de fond et a arrêté cette activité, suite à la douleur.

 

 

Son médecin, interpellé par cette présentation atypique, lui demande de réaliser une IRM de la région du talon et oriente le radiologue par un laconique “bilan APS”. La question de l’indication d’une échographie en première intention peut se poser mais l’impossibilité d’appuyer sur le talon risque de compromettre la qualité de l’examen.

Diagnostic

L’IRM montre une aponévrose plantaire superficielle d’épaisseur normale (moins de 5 mm), mais un halo oedémateux au niveau des tissus mous de la périphérie de l’enthèse sur le calcaneum (Fig. 1). Le corps de l’aponévrose présente un aspect normal, de même que le coussinet veineux plantaire. Aucun ostéophyte de traction du muscle court fléchisseur plantaire n’est vu sur les coupes en T1 (Fig. 2). En superficie de ce muscle, on note néanmoins un cordon de 30 mm de long en hyposignal, entouré d’un hypersignal inflammatoire (Fig. 3). Lorsque l’on suit cette structure tubulée sur les coupes successives, son signal se normalise et se raccorde aux éléments vasculo-nerveux du tunnel tarsien. Cet élément est très évocateur de thrombose de la veine plantaire latérale.

Figure 1 – IRM, coupe sagittale T2 FatSat. Œdème en périphérie de l’aponévrose plantaire superficielle, mais épaisseur normale.

Figure 2 – IRM, coupe sagittale T1. Pas d’enthésophyte de traction du court fléchisseur des orteils.

Figure 3 – IRM, coupes sagittale (a) et frontale (b) en T2 FatSat. Image en hyposignal tubulaire correspondant à une thrombose du réseau veineux plantaire latéral.

Un complément échographique est alors réalisé. Celui-ci va montrer le caractère non compressible de la structure veineuse, ainsi que l’absence de flux Doppler en son sein, confirmant la thrombose (Fig. 4). Le reste de l’étude échographique ne montre aucune compression veineuse d’amont, ni de thrombose veineuse sus-jacente.

Figure 4 – Coupe échographique longitudinale montrant une image hypoéchogène non compressible tubulaire correspondant à une thrombose du réseau veineux plantaire latéral.

Discussion

La thrombose plantaire est une pathologie rare, pouvant survenir dans un contexte d’activité physique intense (ce n’était pas le cas dans cette observation). Sa présence doit faire rechercher des facteurs favorisants (ici, l’association pilule et tabac), un trouble de la coagulation, ou une maladie générale dont elle ne serait qu’une manifestation (syndrome paranéoplasique).

Le traitement anticoagulant est justifié par le risque d’extension aux veines tibiales postérieures.

La thrombose veineuse plantaire est un diagnostic peu connu et dont la fréquence est probablement sous-estimée. L’examen clinique est trompeur, dominé par une tatalgie et le diagnostic est réalisé par l’échographie ou l’IRM.

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