Nous avons récemment publié deux manuscrits dans les revues PlosOne (16) et International Journal of Sport Medicine (IJSM) (17) qui proposent une typologie de la fatigue à partir de la mesure de la VFC.
Dans la première étude (16), nous avons présenté le suivi VFC de 57 skieurs nordiques des équipes de France (biathlon, combiné nordique, ski de fond) sur une période de 5 années. Ce suivi est réalisé de manière écologique dans le déroulement normal de l’entraînement des athlètes. Nous avons différencié deux groupes de tests VFC à partir des réponses au questionnaire de fatigue de la Société française de médecine du sport (QSFMS).
Les bilans au test QSFMS supérieurs à 20 items sur 54 ont permis de constituer un groupe de test “fatigue”, les bilans inférieurs à 20 items constituant le groupe “non-fatigue” (Fig. 5).
Figure 5 – Nombre de tests réalisés pour chaque sujet (57 au total). En blanc (No fatigue), le nombre de tests réalisés quand le score au questionnaire de la société française du sport (QSFMS) est inférieur à la limite des 20 items sur 54 ; en noir (Fatigue), nombre de tests réalisés lorsque le score QSFMS est supérieur à 20 items sur 54 (16).
Les résultats faisant suite à l’analyse statistique ont montré une différence très significative dans les indices de VFC entre les situations “fatigue” et “non-fatigue” (Fig. 6). Globalement, la situation “fatigue” montre des FC augmentées dans les positions couchée et debout et des énergies très diminuées dans les bandes spectrales LF, HF et donc LF + HF aussi bien couchée que debout.
Figure 6 – Boîtes à moustache représentant toutes les valeurs enregistrées pour tous les sujets. Elles sont délimitées par les 1er et 3e quartiles. La ligne noire représente la valeur médiane. La valeur des 10 % et 90 % est représentée par les barres verticales. Les cercles aux extrémités représentent les plus basses et plus hautes valeurs.
Sont mesurées les valeurs de fréquence cardiaque (heart rate ; HR) et les paramètres de variabilité de FC (LF, basse fréquence ; HF, haute fréquence ; TP, puissance totale ; rapport LF/HF) en position couchée (A) et debout (B).
Les états de fatigue (172 cas) sont en gris et ceux de non-fatigue (891 cas) en blanc.
Les valeurs de VFC ont été transformées en Log. ### pour p < 0,001 dans les différences entre “fatigue” et “non-fatigue”.
Un point est très intéressant dans le tableau présenté ci-dessous (Tab. 1) : dans la différence de variance intrasujet entre les états de fatigue et de non-fatigue, on observe des différences très significatives dans la FC ainsi que plusieurs paramètres de VFC. Ceci nous a permis d’émettre l’hypothèse que dans le groupe “fatigue”, des états très différents de fatigue coexistaient, expliquant cette plus grande variance dans les paramètres VFC dans le groupe “fatigue” que dans le groupe “non-fatigue”.
Tableau 1 – Analyse statistique de type multi-niveaux des paramètres de variabilité de fréquence cardiaque dans les conditions de fatigue et de non-fatigue. LF, basse fréquence ; HF, haute fréquence ; TP, puissance totale ; LF (nu), LF en unité normalisée ; HF (nu), HF en unité normalisée et HR, fréquence cardiaque.
La colonne Beta représente l’écart moyen entre les valeurs de “fatigue” et de “non-fatigue”. Par exemple, entre les enregistrements “fatigue” et “non-fatigue” la FC en position couchée était en moyenne de 6,27 bpm supérieure en condition “fatigue” et le logTP était en moyenne de 0,36 inférieur en condition “non-fatigue”.
La colonne des variances représente la variance pour chaque sujet des valeurs du groupe “fatigue” et du groupe “non-fatigue” et la différence de significativité entre les deux variances.
Dans la deuxième étude (16), nous avons cherché à voir si par une analyse statistique, différents groupes de fatigue pouvaient être constitués. Une analyse en composante principale (ACP) suivie d’une classification hiérarchique par groupes ont été réalisées (Fig. 7).
Figure 7 – Représentation sous forme de radars des différences relatives (%) entre la valeur médiane de “non-fatigue” pour le même groupe de sujets et les différentes situations de “fatigue” pour la fréquence cardiaque (HR) et les paramètres de variabilité de FC (LF, basse fréquence ; HF, haute fréquence ; TP, pour LF + HF) en position couchée et debout. Le trait en pointillé représente la moyenne des tests non-fatigue ; le trait plein la différence en pourcentage entre les situations “non-fatigue” et “fatigue” pour les paramètres HF, LF et LF+HF de VFC ainsi que pour la FC dans les positions couchée (SU pour supine) et debout (ST pour standing).
Le trait en pointillé représente la moyenne des tests non-fatigue ; le trait plein la différence en pourcentage entre les situations “non-fatigue” et “fatigue” pour les paramètres HF, LF et LF + HF de VFC ainsi que pour la FC dans les positions couchée (SU pour supine) et debout (ST pour standing).
Quatre types de fatigues ont ainsi pu être caractérisés de manière statistique (Encadré).