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Partie 1 : les modifications anatomiques et physiologiques de la grossesse

Introduction

Probablement du fait de leur culture méditerranéenne, les médecins du sud de l’Europe hésitent à recommander les activités physiques ou sportives pendant la grossesse. Cette frilosité ne se justifie pas, d’autant que, en cas de grossesse normale, de nombreux arguments plaident pour la poursuite des sports pratiqués ou la mise en place d’une activité physique régulière et adaptée dont les effets métaboliques et cardiorespiratoires sont largement bénéfiques sur l’état de santé de la femme enceinte. Nos confrères nord-américains et scandinaves ont apporté, ces dernières années, d’importantes modifications aux recommandations concernant l’activité physique durant la grossesse.

 

Remerciements au Pr Yves Aubart, service de gynécologie obstétrique du CHU de Limoges, pour ses orientations pédagogiques et bibliographiques.

La grossesse entraîne des modifications anatomiques et physiologiques de l’organisme maternel. Quelles en sont les implications pratiques dans la mise en place et la surveillance d’activités physiques ?

A – Prise de poids pendant la grossesse et activités physiques

Pendant la première moitié de la grossesse, la majeure partie de la prise de poids se situe, chez la mère, sous la forme de réserves lipidiques. Cette prise de poids est également le fait d’une augmentation importante du volume plasmatique. Pendant la deuxième moitié de la grossesse, la prise de poids se situe en priorité au niveau du placenta et du foetus. En fin de grossesse, la prise de poids considérée comme idéale est d’environ douze kilos. Deux tiers de la prise de poids totale est alors le fait du placenta, du liquide amniotique et du foetus. Un tiers est le fait des dépôts lipidiques de réserve et du volume sanguin circulant. L’ensemble des études concernant l’activité physique pendant la grossesse montre que les patientes pratiquant une activité sportive régulière, adaptée et raisonnable, ne dépassent pas cette prise de poids de douze kilogrammes, considérée comme idéale (1-4).

Les femmes enceintes pratiquant une activité physique adaptée ne dépassent pas la prise de poids idéale de 12 kg.

B – Modifications morphostatiques et ostéoligamentaires : les risques de blessures traumatiques

La prise de poids et les modifications morphologiques s’accompagnent, du fait de la protrusion de l’utérus gravide, de modifications morphostatiques :

• hyperlordose lombaire,

• cyphose dorsale,

• antéversion du bassin.

 

Ces différentes modifications impliquent un déplacement du centre de gravité pouvant expliquer les troubles de l’équilibre et être responsables de la grande fréquence des lombalgies chez les femmes enceintes (1, 4-6).

En raison des modifications hormonales liées à l’augmentation de la sécrétion des hormones stéroïdes (progestérone, estrogène) pendant la grossesse, une hyperlaxité ligamentaire et une augmentation des amplitudes articulaires surviennent régulièrement dès le premier trimestre de la grossesse (1, 2, 6, 7). Cette souplesse peut favoriser la réalisation de mouvements de grande amplitude et être bénéfique pour la pratique d’activités comme la gymnastique artistique. L’amélioration de la souplesse maternelle pendant le premier trimestre de la grossesse pourrait avoir été utilisé dans le sport de haut niveau pour améliorer les performances des gymnastes à l’occasion de compétitions internationales (7).

Les troubles de l’équilibre associés à une hyperlaxité ont-ils un impact réel sur l’augmentation des blessures musculosquelettiques chez les femmes qui poursuivent une activité physique pendant la grossesse ? De nombreux auteurs ne relèvent pas une augmentation de l’incidence des blessures lors de la pratique sportive pendant la grossesse, mais considèrent que les patientes enceintes souhaitant poursuivre les activités à risque sur le plan traumatologique (sports collectifs, course à pied, ski alpin, tennis) devraient être informées des risques possibles de traumatismes articulaires (1, 2, 5, 6).

C – Modifications cardiovasculaires et surveillance de la fréquence cardiaque

Du fait de l’augmentation régulière du volume sanguin, de profondes modifications hémodynamiques vont être induites par la grossesse :

• augmentation du volume d’éjection systolique,

• augmentation du débit cardiaque,

• augmentation de la fréquence cardiaque.

 

Chez les femmes enceintes actives physiquement, Clapp et Capeless ont décrit une augmentation significative du débit cardiaque tout au long de la grossesse (8). L’augmentation du débit cardiaque de repos et du volume d’éjection systolique se fait progressivement mais rapidement.

Ainsi, le débit cardiaque de repos est augmenté de 10 % à la fin du premier trimestre, puis augmente de 20 % pendant le second trimestre pour atteindre son maximum dès la moitié de la grossesse et se stabiliser ensuite. Cette augmentation est en relation avec l’augmentation de la fréquence cardiaque qui augmente régulièrement, surtout à partir du deuxième trimestre. La fréquence cardiaque augmente de 20 % au cours du deuxième puis du troisième trimestre, pour atteindre son maximum à la trente-deuxième semaine d’aménorrhée. En fin de grossesse, la fréquence cardiaque est en moyenne augmentée de 30 à 50 % par rapport à la fréquence cardiaque de repos habituelle. Après l’accouchement, la fréquence cardiaque de repos revient rapidement aux fréquences d’avant la grossesse. Mais le volume d’éjection systolique revient beaucoup plus lentement à son niveau initial, et peut rester significativement plus élevé que celui d’avant la grossesse, ceci pendant une période qui peut durer un an (8, 9).

La baisse des résistances périphériques s’accompagne d’une pression artérielle qui diminue jusqu’au milieu du second trimestre, puis augmente régulièrement pour revenir dans les dernières semaines à un niveau comparable à celui qui précède la grossesse (1, 2, 4, 6).

Enfin, une augmentation de la pression veineuse au niveau des membres inférieurs est présente dès le premier trimestre. En décubitus dorsal, la compression du retour veineux et de la veine cave par l’utérus gravide peut être à l’origine de malaises et de chutes tensionnelles. De ce fait, et ceci dès la fin du premier trimestre, les sports et les exercices en décubitus dorsal doivent être proscrits chez la femme enceinte (1, 2, 6, 10).

Les modifications respiratoires pendant la grossesse sont importantes.

D – Modifications respiratoires et surveillance de la dyspnée

Les modifications respiratoires pendant la grossesse sont importantes. La fréquence respiratoire est pratiquement augmentée de 50 % avec, pour résultat, une hyperoxie associée à une hypocapnie et une alcalose respiratoire. De plus, du fait de la pression de l’utérus sur le diaphragme, le volume résiduel et le volume de réserve expiratoire sont très largement diminués dès le deuxième trimestre (1, 2, 6).

L’essoufflement doit être un critère essentiel de surveillance de toute activité physique chez une femme enceinte, la dyspnée étant un excellent indicateur du niveau de l’intensité d’entraînement. Le test de la parole, c’est-à-dire la possibilité pour la patiente de tenir une conversation pendant l’exercice, est largement utilisé au Canada pour déterminer le niveau d’intensité Les modifications respiratoires pendant la grossesse sont importantes. acceptable (6, 10).

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