
Anne, adepte de la course à pied, se plaint de douleurs aux jambes.
Lors d’une consultation
Anne G., 30 ans, infirmière libérale et coureuse à pied licenciée en club d’athlétisme, vient consulter pour des douleurs de jambes évoluant depuis plus de 6 mois. Ces douleurs sont situées au niveau du tiers moyen des deux tibias et sont essentiellement déclenchées par la course à pied, mais elles sont aussi ressenties à la marche. Elles sont aggravées par les séances d’entraînement sur la piste, limitent la durée et la fréquence des entraînements et empêchent d’envisager une réelle programmation en vue de compétitions. L’examen clinique montre des douleurs « exquises » bien localisées à la pression des faces médiales des deux tibias.
Les traitements médicaux habituels (étirements des muscles de la jambe, travail d’équilibre, semelles orthopédiques pour diminuer la pronation, rééducation avec renforcement excentrique des muscles tibiaux postérieurs et antérieurs), mis en place depuis plusieurs mois, n’ont en rien fait évoluer favorablement la symptomatologie douloureuse.

A et B : coupe axiale en pondération T2 ; C : coupe sagittale en pondération T2. Flèche rouge : œdème périosté ; Flèche bleue : œdème osseux
Quiz 1 • Qu’en pensez-vous ?
Chez une coureuse à pied qui présente depuis plusieurs mois des douleurs des deux jambes associées à une importante gêne fonctionnelle, nous devons envisager :
A. Une périostite bilatérale
B. Une fracture de contrainte bilatérale
C. Une enthésopathie de l’insertion tibiale des muscles tibiaux postérieurs
Réponse : B
Quiz 2 • Quelle imagerie demanderiez-vous ?
Pour préciser le niveau et le type de l’atteinte osseuse, vous appelez votre radiologue ressource pour qu’il organise :
A. Une radiographie standard des deux tibias
B. Une scintigraphie osseuse
C. Une IRM des deux tibias
Réponse : C
Quiz 3 • Quel délai de reprise de la course à pied recommanderiez-vous à cette patiente ?
Vous devez conseiller à la sportive d’arrêter la course à pied :
A. Pendant 1 mois
B. Pendant 3 mois
C. Pendant 6 mois
Réponse : B
Lors d’une consultation 7 mois plus tard…
Anne n’a pu suspendre son activité professionnelle, mais a accepté de ne pas courir pendant 3 mois. Elle a repris ensuite l’entraînement, mais en diminuant le nombre (deux séances par semaine) et la durée des séances (45 minutes maximum par séance). Elle a arrêté de s’entraîner sur la piste et ne court que sur les chemins.
Pourtant, après 4 mois de reprise avec simplement deux séances de 45 minutes par semaine, la sportive vient consulter pour des sensations de jambes lourdes et de courbatures au niveau des deux mollets et de la face antérolatérale des deux jambes avec une prépondérance à droite. Ces douleurs ne perturbent pas l’entraînement, mais sont très gênantes le lendemain des séances. Elles sont aggravées par la marche, la descente des escaliers, s’accompagnent d’une sensation d’instabilité de cheville et limitent l’activité professionnelle. À l’examen, 3 jours après une séance de course à pied, la clinique est très pauvre, les douleurs osseuses à la pression de la face médiale des tibias ont totalement disparu.
Quiz 4 • Face à des douleurs persistantes, à quoi pensez-vous ?
Devant des douleurs musculaires à distance de l’exercice, vous devez envisager chez cette sportive :
A. Des courbatures induites par l’exercice ou Delayed Onset Muscle Soreness (DOMS)
B. Des pièges vasculaires du creux poplité
C. Une insuffisance veineuse chronique
D. Un syndrome de loge bilatéral
Réponse : D
La périostite, une pathologie complexe qui guérit presque toujours avec des solutions simples et connues.
En cas de périostite, dans la grande majorité des cas, les coureurs ne viennent pas consulter les médecins du sport. Les simples conseils donnés par les entraîneurs, les autres coureurs ou les articles sur Internet suffisent très souvent à faire disparaître les phénomènes douloureux. Un changement de chaussure, un changement de mode d’entraînement (durée, fréquence, intensité), un changement des surfaces d’entraînement, les étirements des muscles de la jambe, le glaçage de la zone douloureuse après chaque sortie, les pansements à base d’argile ou d’anti-inflammatoires et le port de chaussettes ou de manchons de contention sont des solutions connues des coureurs à pied et qui permettent le plus souvent de faire disparaitre la symptomatologie douloureuse.
Pour toute pathologie complexe, il y a des solutions simples, connues et fausses…
Devant un coureur à pied qui consulte le médecin du sport pour des douleurs de jambe évoluant depuis plusieurs mois, nous devons d’emblée envisager les causes les plus redoutables : fracture de fatigue et syndrome de loge à l’exercice. En cas de syndrome de loge avéré par la prise des pressions intramusculaires au repos et à l’exercice, le traitement est chirurgical. Ce geste chirurgical est très lourd puisque la technique recommandée par W. Turnipseed, leader internationalement reconnu de la chirurgie des syndromes de loge à l’effort, associe trois niveaux d’intervention : une phlébolyse complète de tous les éléments compressifs du creux poplité, une résection proximale du plantaire grêle, une aponévrectomie étendue des trois aponévroses de la jambe.