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Covid-19 & sport – Conduite à tenir

Dr Alain Frey (Service de médecine du sport, CHI Poissy/Saint-Germain, Saint-Germain-en-Laye)

Le SARS-CoV-2

Le SARS-CoV-2 est un virus émergent de la famille des coronavirus. Ce virus à tropisme respiratoire peut théoriquement infecter près de 60 % de la population avant que sa propagation soit ralentie par l’immunité collective.

Transmission

La transmission se fait par gouttelettes ou postillons, principalement de l’adulte à l’enfant, ce dernier étant moins ou peu transmetteur. Les masques sont ainsi efficaces contre cette transmission à un degré divers selon leur conception (1).

La présence du virus est plus élevée dans les voies aériennes supérieures. Il diffuse plus rapidement et mute pour mieux se transmettre sans occurrence sur la gravité de la maladie (mutation anglaise, sud-africaine, brésilienne, indienne…). Les différentes souches diffusent si bien sans résistance que ses mutations n’augmentent pas sa virulence.

Définition de cas contact

La définition d’un cas contact est le suivant : être environ 10 à 15 minutes en relation face à face à moins d’un mètre dans un endroit clos ou lors de serrage de mains, car celles-ci ne sont jamais stériles et souvent riches en inoculum. Tout ceci est variable en fonction de l’atmosphère ambiante (taux d’humidité et température).

Rappels épidémiologiques (2)

• La létalité réelle est inconnue, car le dénominateur est inconnu (% patients asymptomatiques inconnu :
 40 à 60 % ?). On ne fait donc pas le rapport du nombre de morts aux seuls cas testés positifs, mais à l’estimation de tous ceux qui ont été infectés par le virus.

• Taux d’attaque : 20 à 30 %, traduit par la vitesse d’accumulation de nouveaux cas : il correspond à un taux d’incidence cumulée.

Taux d’attaque dans le même foyer plus élevé et fonction de l’âge : 23 % moins de 5 ans, 68 % > 65 ans.

• Les enfants < 10 ans et les femmes sont moins touchés. Quelques cas sévères décrits chez l’enfant < 1 an, mais aucun décès.

Contamination et signes cliniques (3)

Contamination

• La durée d’incubation a une médiane entre 5 et 6 jours avec des extrêmes allant de 1 à 14 jours. 

• Le délai médian entre les symptômes et la dyspnée est de 8 jours et le délai médian entre les symptômes et l’admission en réanimation est de 10,5 jours.

• Le temps de guérison est de 2 semaines pour les formes peu sévères et de 3 à 6 semaines pour les cas graves.

Signes cliniques

Les signes cliniques sont résumés dans le tableau 1 avec une atteinte pulmonaire préférentielle. Les atteintes cardiovasculaires (myocardite, embolie pulmonaire, thrombose) se retrouvent chez environ 20 % des patients le plus souvent symptomatiques alors que les atteintes neurologiques (méningite, encéphalite, syndrome de Guillain-Barré) se retrouvent chez environ 30 % des patients symptomatiques.

L’atteinte pulmonaire

Pour confirmer l’atteinte pulmonaire liée à la Covid-19, seul le scanner sans injection doit être fait pour les patients avec symptômes respiratoires selon le schéma suivant :

• si le patient présente une dyspnée avec désaturation en air ambiant, un scanner thoracique sans injection est réalisé ;

• si le patient présente une forme sévère, il est alors proposé un angio-scanner devant le risque important d’embolie pulmonaire.

Une asthénie persistante prolongée peut survenir dans les suites du Covid-19 entraînant ainsi des problèmes pour reprendre son travail ou une activité physique.

Détection virologique 

La détection de l’ARN viral par RT-PCR

La détection de l’ARN viral par RT-PCR sur prélèvement nasopharyngé est actuellement la technique de référence pour le diagnostic de l’infection par le coronavirus SARS-CoV-2. 

Principe

Lorsque le matériel génétique présent à l’origine dans l’échantillon analysé est suffisamment amplifié, la fluorescence mesurée augmente de façon exponentielle. Le nombre de cycles à partir duquel cette fluorescence est détectable (appelé Ct pour cycle threshold) est inversement proportionnel à la quantité de matériel génétique présent dans l’échantillon analysé. Plus ce nombre de cycles est faible, plus la quantité d’ARN viral du coronavirus SARS-CoV-2 est importante dans les sécrétions nasopharyngées (4, 5).

Interprétation et charge virale

Cette valeur du Ct (Tab. 2) indique une quantité d’ARN viral à un instant “t”. Il faut rester prudent dans son interprétation, notamment pour les sujets contacts testés en général 7 jours après le contact potentiellement contagieux : un Ct important à cet instant (charge virale faible) pourra correspondre au début de l’infection virale, au moment de la phase ascendante de la multiplication virale, ce Ct pourra être beaucoup plus faible le lendemain…

Le virus peut être isolé de 1 à 3 jours avant les symptômes, donc le sujet est contagieux et peut déjà transmettre le virus. La charge virale nasopharyngée est équivalente chez les présymptomatiques et les asymptomatiques. L’infection est d’autant plus sévère que l’inoculum est important. En réduisant l’inoculum, on diminue les symptômes et la gravité, d’où l’importance des gestes barrières (port du masque, lavage des mains…).

Les anticorps sont détectés alors même que les PCR sont encore positives et reflètent l’immunité humorale.

La cinétique des tests est représentée dans la figure 1.

Figure 1 – Cinétique des tests d’après Sethuraman (6).

Le test antigénique

Le test antigénique a une sensibilité globale de 50 %, car il détecte la protéine N et n’est pas affecté par les mutations de la protéine Spike.

Le test salivaire

Le test salivaire est à réaliser en première intention chez les personnes asymptomatiques. Il est désormais indiqué dans le cadre d’un dépistage itératif ciblé à large échelle sur population fermée. La sensibilité est excellente pour les charges virales élevées (PCR CT < 25), la spécificité de ces tests est excellente.  Il apparaît  ainsi inutile de contrôler les tests positifs par RT-PCR dans la population générale alors que cela est fait systématiquement chez nos sportifs de haut niveau.

Le test sérologique

La séroconversion n’est pas accompagnée de l’élimination immédiate du virus, mais d’une diminution progressive de la charge virale. La réponse en anticorps ne suffit donc pas à elle seule à éliminer le virus. Les tests sérologiques ne permettent pas de statuer si la personne est contagieuse ou pas. La détection d’IgM et/ou d’IgG est optimale chez tous les patients à partir de J15 et à 99 % à J28.

Les tests sérologiques ne sont donc pas recommandés dans le cadre du diagnostic précoce de l’infection Covid-19 lors des deux premières semaines suivant l’apparition des symptômes.

Les anticorps peuvent disparaître en quelques semaines… Ce qui ne signifie pas qu’il n’y a plus d’immunité.

Une immunité cellulaire robuste au travers des cellules T et B existe après l’infection chez les patients symptomatiques et asymptomatiques, mais est plus marquée chez les symptomatiques. 

Vaccin

Principe

Le vaccin n’empêche pas d’être infecté, mais il diminue le fait de contracter une forme grave. Il faut connaître le cycle viral pour trouver les cibles pour un vaccin. Dans la figure 2, nous voyons la réponse de l’organisme après une dose vaccinale confirmant le fait que nous pouvons encore présenter le Covid-19 entre la première et la deuxième injection.

Figure 2 – Cinétique des anticorps (2).

Plusieurs variants existent (Tab. 3), mais comme dans tous les virus qui mutent au gré des contacts et des conditions environnementales.

Le vaccin doit être sûr et efficace surtout chez les personnes plus âgées. Les différents vaccins sont expliqués dans la figure 3.

Figure 3 – Les différents vaccins (2).

Développement des vaccins

C’est une situation inhabituelle, car ces vaccins ont pu être autorisés très rapidement avec seulement
6 mois entre la déclaration de l’épidémie et la mise en place des essais de phase III et moins de 1 an pour le début de la vaccination. Cela a été facilité en partie par les progrès scientifiques en immunologie et virologie ainsi que par l’existence de technologies développées antérieurement pour d’autres vaccins (plateformes vaccinales).

Protection vaccinale

La protection vaccinale après une première dose est d’environ 50 %. Il n’est pas nécessaire de faire une sérologie avant la vaccination. Les patients ayant eu le Covid-19 ne bénéficient que d’une injection à faire entre 3 et 6 mois après la maladie.

Conduite à tenir chez le sportif

Cette pandémie nous a imposé des règles de suivi chez nos sportifs entre ceux qui sont asymptomatiques et ceux qui ont attrapé le Covid-19.

Les recommandations australiennes

En Australie, l’Institut national du sport (AIS) a développé l’algorithme présenté dans la figure 4. Le suivi australien se fonde sur les symptômes potentiels du Covid-19 ; s’ils sont positifs, une prise en charge adaptée est réalisée avec un encadrement jusqu’au retour sur le terrain.

Figure 4 – Algorithme de gestion du Covid-19 pour les sportifs australiens par l’AIS (7).

Les recommandations anglaises

Les Anglais ont établi un consensus de 36 recommandations avec des niveaux de preuve regroupées dans le tableau 4 (8). Le retour au sport chez les sportifs anglais d’élite confirmés (ou suspectés) positifs au Covid-19 est proposé par Wilson (9). Ils recherchent les points suivants :

• les antécédents,

• l’examen physique doit tenir compte de la possible atteinte par le Covid-19 de tous les organes comme le système neurologique, digestif ou dermatologique,

• la biologie avec des marqueurs simples (CRP, VS, troponine),

• une radiographie pulmonaire,

• un bilan cardiaque comprenant une ECG, une échocardiographie, une épreuve d’effort cardio-pulmonaire avec mesure de la consommation maximale d’oxygène et une IRM cardiaque au moindre doute.

Figure 5 – Algorithme anglais chez leurs sportifs de haut niveau (9).

Les recommandations européennes

L’association européenne de prévention en cardiologie émet les recommandations présentées dans la figure 6 sur le sport et l’exercice dans le contexte de la pandémie de Covid-19 par Tee Joo Yeo (10). Le Pr François Carré et le club des cardiologues du sport (11) proposent :

• Il est rappelé que les 10 règles d’or des cardiologues du sport sont toujours en vigueur et encore plus lors de la reprise du sport en cette période de pandémie.

• Il est préconisé de courir plutôt côte à côte pour limiter la diffusion du virus lors de la respiration.

• Les signes cliniques suivants qui apparaissent pendant un effort doivent imposer l’arrêt impératif de toute activité sportive et le sportif doit consulter son médecin traitant :

• douleurs thoraciques,

• dyspnée avec un essoufflement anormal,

• sensation de palpitations (cœur trop rapide et/ou irrégulier),

• anosmie et/ou agueusie brutale,

• asthénie anormale,

• température ≥ à 38°C avant ou après l’effort,

• reprise ou apparition d’une toux sèche.

Figure 6 – Recommandations européennes (10).

Les préconisations chez les sportifs en France 

Chez le sportif amateur

Chez le sportif amateur en France, les préconisations sont les suivantes :

• si le patient est asymptomatique et non contact depuis au moins 15 jours ou paucisymptomatique, le sujet peut effectuer une reprise du sport progressivement sans consultation, en surveillant l’apparition de symptômes ;

• si le patient a présenté le Covid-19, il ne peut reprendre le sport que 14 jours après guérison et de manière très progressive après avoir vu son médecin traitant ;

• si le patient a été hospitalisé, un avis médical et cardiologique est nécessaire pour réaliser un bilan avec au minimum un ECG, une échographie cardiaque et une épreuve d’effort avec analyse des échanges gazeux afin de dépister les séquelles d’une myocardite.

Chez le sportif de haut niveau ou professionnel

Chez le sportif de haut niveau ou professionnel, les préconisations sont les suivantes :

• si le patient est asymptomatique et non contact depuis au moins 15 jours, il peut reprendre le sport progressivement sans consultation en surveillant l’apparition de symptômes ;

• si le patient a eu le Covid-19, mais non hospitalisé, il doit effectuer un bilan médical avec ECG ; si celui-ci est négatif, il peut reprendre progressivement, si des anomalies sont dépistées, un avis cardiologique s’impose avec une échographie cardiaque, une épreuve d’effort avec mesure de la saturation et des échanges gazeux et éventuellement un Holter rythmique sur 24 heures incluant une phase d’entraînement. De toute façon, la reprise du sport ne se fera que 14 jours après guérison ;

• si une myocardite a été découverte et confirmée par une IRM cardiaque, le sportif devra attendre un délai de 3-6 mois avant de reprendre la compétition. 

Syndrome post-Covid-19

Près de 30 % des patients ayant présenté un Covid-19 symptomatique ou peu symptomatique ont des symptômes persistants plus de 3 mois après et ce, quel que soit l’âge, qui sont les suivants :

• asthénie,

• anosmie, agueusie,

• gène respiratoire,

• palpitations,

• arthralgie,

• trouble psychique variable.

Il est nécessaire d’évaluer ces sportifs s’ils se retrouvent dans ce cas avec un bilan complet clinique, cardiologique et évaluation de leur fonction respiratoire à l’effort afin de les accompagner dans leur reprise sportive.

Bibliographie

1. Leung NHL, Chu DKW, Shiu EYC et al. Respiratory virus shedding in exhaled breath and efficacy of face masks. Nat Med 2020 ; 26 : 676-80.

2. Site Santé publique France. www.santepubliquefrance.fr.

3. Lauer SA, Grantz KH, Qifang Bi et al. The incubation period of coronavirus disease 2019 (Covid-19) from publicly reported confirmed cases: estimation and application. Ann Intern Med 2020 ; 172 : 577-82.

4. Zheng S, Fan J, Yu F et al. Viral load dynamics and disease severity in patients infected with SARS-CoV-2 in Zhejiang province, China, January-March 2020: retrospective cohort study. BMJ 2020 ; 369 : m1443.

5. Wang W, Xu Y, Gao R et al. Detection of SARS-CoV-2 in different types of clinical specimens. JAMA 2020 ; 323 : 1843-4.

6. Sethuraman N, Jeremiah SS, Ryo A. Interpreting diagnostic tests for SARS-CoV-2. JAMA 2020 ; 323 : 2249-51.

7. Hughes D, Sawa R, Pereraa NKP et al. The Australian Institute of Sport framework for rebooting sport in a Covid-19 environment.
J Sci Med Sport 2020 ; 23 ; 639-63.

8. Barker-Davies RM, O’Sullivan O, Senaratne KPP et al. The Stanford Hall consensus statement for post-COVID-19 rehabilitation. Br J Sports Med 2020 ; 54 : 949-59.

9. Wilson mg, Hull JH, Rogers J et al. Cardiorespiratory considerations for return-to-play in elite athletes after Covid-19 infection: a practical guide for sport and exercise medicine physicians. Br J Sports Med 2020 ; 54 : 1157-61.

10. Yeo TJ. Sport and exercise during and beyond the Covid-19 pandemic. Eur J Prev Cardiol 2020 ; 27 : 1239-41.

11. Site du club des cardiologues du sport. www.clubcardiosport.com.

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