Dermatose circulaire
Trois exemples apparus au décours de la pratique d’un sport
De nombreuses dermatoses ont un aspect circulaire. Dans ce contexte, nous allons exposer les cas de trois patients qui ont effectué des activités sportives, et qui présentent des lésions secondaires à cette pratique ; lésions très classiques que le praticien doit connaître pour effectuer une prise en charge adaptée. De cette manière, le sujet concerné peut reprendre en toute quiétude ses activités sportives.
Cas 1
Michel, 59 ans, nous consulte car, depuis quelques semaines, il a remarqué la présence d’une lésion circulaire dont les bords sont érythémateux et bien limités (Fig. 1) au niveau de l’extrémité inférieure de l’une de ses jambes. La partie centrale semble être normale.

Cette dermatose fait suite à la pratique intensive, du fait d’une préparation à une compétition, pour la course de chiens de traîneaux. Notre patient se demande si la promiscuité avec ses chiens ne pourrait pas être à l’origine de la lésion observée.
En réalité, compte tenu de la pratique sportive spécifique avec un contact étroit avec des animaux, mais aussi le caractère spécifique des lésions décrites, nous ne pouvons que poser le diagnostic de dermatophytie circinée.
La dermatophytie circinée (1-4)
Introduction
Cette mycose superficielle est secondaire au développement d’un dermatophyte. Il ne s’agit pas d’une virose contrairement à une autre dénomination donnée pour cette dermatose (herpès circiné). Cette affection est fréquente (elle représente près de 5 % des consultations dermatologiques).
Trois espèces sont classiquement responsables de cette dermatophytose :
• les espèces géophiles,
• et les espèces zoophiles qui sont transmises par un animal (par des chiens dans le cas de notre patient),
• les espèces anthropophiles (les plus importantes, car elles représentent 80 % de ces dermatoses).
Clinique
Les premières manifestations cliniques débutent le plus souvent dans les 2 semaines après une contamination. Au départ, nous observons une maculo-papule dont les bords sont surélevés et se développent dans toutes les directions de manière centrifuge. Le bord peut être constitué de papules érythémateuses ou de vésicules. La partie centrale est souvent plus ou moins brune, avec parfois une hypopigmentation, et des squames en quantité plus ou moins importante. Cette partie centrale semble saine par rapport à la partie périphérique.
Un prurit est associé parfois avec cette dermatose, mais de manière très inconstante.
Diagnostic différentiel
Plusieurs dermatoses peuvent avoir un caractère similaire, mais leur sémiologie est souvent différente.
• Le granulome annulaire qui est caractérisé par un bourrelet périphérique, une sorte d’anneau dépourvu de vésicules, avec involution centrale (la peau en partie centrale est saine) (Fig. 2).

• L’eczéma nummulaire qui est constitué des plaques uniformes rondes et bien délimitées avec parfois des lésions suintantes (Fig. 3).

• Le psoriasis qui est constitué de plaques rondes ou ovales de couleur rouge plus ou moins soutenue, et présentant des squames adhérentes blanc-argenté (Fig. 4).

• Le pityriasis rosé de Gibert, pour lequel il est observé des papules avec de fines squames de couleur rose ou rouge très clair. Les lésions sont nombreuses et prédominent au niveau du tronc et de l’abdomen. L’axe de ces lésions est orienté le long des lignes de la peau en donnant un aspect de branches de pins (Fig. 5).

Diagnostic
Il est essentiellement clinique. Il est possible d’effectuer un prélèvement avec une curette ou un grattoir. Des filaments mycéliens sont retrouvés. Une culture sur des lésions inflammatoires peut être réalisée.
Traitement
Il repose sur l’administration d’antifongiques locaux appliqués deux fois par jour durant au moins 15 jours. Les antifongiques administrés par voie générale sont prescrits en associant avec les antifongiques locaux dans le cas de présence de lésions multiples.
Certains auteurs recommandent l’utilisation de corticoïdes oraux en cure courte dans le cas d’une atteinte inflammatoire importante.
Cas 2
Hassan, 8 ans, nous consulte car il présente, à la suite d’une sortie sur 15 jours dans le cadre de son association sportive (il pratique du football), des plaques circulaires croûteuses, et parfois mélicériques (Fig. 6, flèche rouge) au niveau des cuisses et du thorax.

Il est vrai que cet enfant s’est beaucoup dépensé, et qu’il a fait très chaud. De plus, en colonie, les conditions d’hygiène des enfants sont parfois rudimentaires. Enfin, deux autres jeunes sont également allés consulter un praticien du fait de lésions similaires au niveau du thorax, et du visage.
En réalité, cette description clinique correspond à un impétigo.
L’impétigo (3-7)
Définition
Il s’agit d’une infection cutanée due à :
• un Staphylococcus aureus (90 % des cas),
• ou un Streptococcus pyogenes.
Il existe parfois une association de ces deux variétés de bactéries.
Cette affection est très contagieuse (cela explique de petites épidémies au sein des collectivités), et se rencontre le plus souvent chez les enfants. On observe cette dermatose chez les patients ayant une hygiène précaire, mais aussi chez les patients exposés à des climats chauds et humides.
Clinique
Au départ, cette lésion se développe suite à une blessure cutanée (le plus souvent peu importante). Deux formes sont classiquement décrites :
• la forme bulleuse,
• et la forme croûteuse (cas de notre patient).
Dans la forme croûteuse, on retrouve initialement des vésicules ou des bulles qui sont disposées sur une base érythémateuse. Par la suite, ces formations disparaissent et laissent la place à des croûtes (parfois jaune comme le miel donnant de ce fait le terme de mélicérique) adhérentes au plan profond qui se développent de manière centrifuge.
Toutes les zones peuvent être concernées par cette dermatose, et souvent l’impétigo évolue en donnant de vastes placards polycycliques (Fig. 7).

Une prise en charge médicale est un impératif, car des risques (même s’ils sont rares) de glomérulonéphrites peuvent survenir.
Diagnostic différentiel
Plusieurs diagnostics différentiels sont classiquement décrits, mais, dans aucun cas, les croûtes mélicériques sont objectivées :
• les dermatophyties circinées (Fig. 1),
• les granulomes annulaires (Fig. 2).
Diagnostic
Il est surtout clinique. Il est possible d’effectuer un prélèvement bactériologique qui objective l’une des deux espèces bactériennes décrites précédemment.
Traitement
Pour les formes peu étendues, un traitement local est recommandé. Des topiques antibiotiques sont utilisés préférentiellement après avoir effectué une désinfection par des antiseptiques locaux. L’antibiothérapie par voie générale est réservée aux formes étendues ou profondes avec atteinte du derme comme les ecthymas (Fig. 8).

Cas 3
Gérard, 45 ans, consulte car il présente depuis quelques mois une lésion au niveau de l’une de ses cuisses. Cet adepte de l’escalade nous explique que cette dermatose est probablement liée à un traumatisme secondaire à l’une de ses équipées.
L’examen clinique de la lésion de couleur brune permet d’observer une lésion d’apparence maculo-papuleuse, mais qui est très ferme au toucher, et semble profonde. Cette formation paraît constituée de deux parties pigmentées différemment (une partie centrale rose, et une partie brune en périphérie) (Fig. 9).

Cette description correspond à celle d’un dermatofibrome.
Le dermatofibrome ou histiocytofibrome (1-4)
Définition
Cette formation est fréquente chez les adultes. Deux théories s’affrontent pour expliquer leur genèse :
• certains considèrent qu’il s’agit d’un processus de transformation localisée bénin ;
• d’autres expliquent que cette lésion serait secondaire à un traumatisme préalable.
Clinique
Le plus souvent, cette entité est définie comme une papule de couleur rose (au centre), et une bordure de couleur brune en périphérie. Le plus souvent également, ces entités sont fermes, isolées, avec un dôme au niveau de leur partie centrale (certains dermato-fibromes ont un aspect rétracté), et leur diamètre varie entre 2 et 10 cm. Elles sont rattachées au plan profond ; même s’il existe une mobilité par rapport à la graisse hypodermique.
Lors de la compression de l’un de ces éléments (rétraction secondaire suite à la palpation), nous avons une impression plastique caractéristique.
Dans certains cas, ces formations peuvent avoir une couleur plus bleue du fait d’un dépôt d’hémosidérine.
Ces formations n’involuent jamais.
Diagnostic
Il est essentiellement clinique. Il est possible d’effectuer une analyse histologique. Dans ce cas, il est observé des cellules fusiformes, des histiocytes, mais aussi des fibres collagènes.
Traitement
S’agissant de lésions tumorales bénignes, le plus souvent, il convient de s’abstenir de traiter ces formations. Bien entendu, une exérèse chirurgicale peut être proposée dans les cas où il existe une gêne (avec les vêtements notamment), ou si cette présence se révèle peu esthétique.
Bibliographie
1. Habif T. Maladies cutanées. Diagnostic et traitement. Ed. Elsevier 2008.
2. Saurat JH, Lipsker D, Thomas L et al. Dermatologie et infections sexuellement transmissibles. Ed Elsevier Masson 2017.
3. Fitzpatrick TB. Atlas en couleurs de dermatologie clinique. Ed. Flammarion Médecine-Sciences 2007.
4. Bolognia JL. Dermatologie : l’essentiel. Ed. Elsevier Masson 2018.
5. Pilly E. Maladies infectieuses et tropicales. Ed. Vivactis plus 2017
6. Bessis D. Manifestations dermatologiques des maladies infectieuses, métaboliques et toxiques. Ed. Springer 2008.
7. Mokini M, Dupin N, Del Giudice
P. Dermatologie infectieuse. Ed. Elsevier Masson 2014.